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La « bientraitance » relationnelle

Véronique, le 10 mai 2011

Définitions de la bientraitance

 

• Définition courante : « Ensemble d’attitudes et comportements positifs et constants de respect, de bons soins, de marques et manifestations de confiance, d’encouragement et d’aide envers des personnes ou des groupes en situation de vulnérabilité ou de dépendance (tout particulièrement les enfants, les personnes âgées, les malades très vulnérables) »

Ce n’est pas seulement l’absence de maltraitance, ni même la prévention de la maltraitance. La notion de bientraitance date des années 90 (cf. historique de la notion ci-après) Le terme désigne alors une démarche « impliquant avant tout, malgré les séparations et les ruptures, de respecter la continuité du développement de l’enfant dans son histoire, non plus à court terme, mais envisagée dans un projet d’avenir, et de l’aider à construire son identité dans la sécurité affective et l’épanouissement de toutes ses possibilités. » (D. Rapoport, « la bien-traitance envers l’enfant »)

Pour rappel : Les établissements accueillant les publics en situation de vulnérabilité ou de dépendance sont amenés à définir des « bonnes pratiques » c’est à dire à décrire les comportements indispensables à mettre en œuvre par leurs équipes. Ils élaborant des guides de bonnes pratiques qui rappellent les obligations légales, et cernent les attitudes exigées pour garantir la bientraitance. Les informations et éléments théoriques cités dans ce document proviennent des recommandations de l’ANESM, l’agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux . Créée en 2007, elle a pour mission principale de développer une culture de la « bientraitance » dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux visés à l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles. Cette agence valide, actualise ou élabore des références, des procédures et des recommandations de bonnes pratiques professionnelles. Elle en assure ensuite la diffusion afin de promouvoir toute action d’amélioration de la qualité des prestations délivrées dans le domaine social et médico-social.

 

La bientraitance vise à promouvoir le bien-être de la personne accueillie, en répondant à ses besoins fondamentaux de la manière la plus personnalisée possible.

- C’est une manière d’être, d’agir et de dire : être soucieux de l’autre, réactif à ses besoins et à ses demandes, respectueux de ses choix et de ses refus. Cela suppose une grande capacité d’adaptation à l’autre.

La bientraitance est à la fois :

- une intention positive : la bienveillance (sinon c’est une série d’actions qui n’ont pas de sens)

- un ensemble d’actes concrets (sans quoi elle se limite à des bonnes intentions).

 

La bientraitance trouve ses fondements dans le respect de la personne, de sa dignité et de sa singularité.

Cette culture est fondée sur le principe de l’égale dignité de tous les êtres humains, figurant dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et réaffirmé dans tous les textes de référence des professionnels du secteur social et médico-social. Elle repose également sur la conviction que tous les usagers sont des personnes dont la capacité de développement et la dignité doivent recevoir les moyens de s’épanouir pleinement.

Elle s’inscrit dans un projet éthique, fondées sur les valeurs les plus partagées : liberté, justice, solidarité, respect de la dignité. En ce sens, la bientraitance est « l’enjeu d’une société toute entière, un enjeu d’humanité ».

La bientraitance valorise l’expression des usagers Les choix exprimés par son représentant légal ou par ses proches sont également déterminants lorsque l’usager lui-même ne peut les énoncer.

Elle comporte aussi le nécessaire souci de maintenir un cadre institutionnel stable, avec des règles claires  et sécurisantes pour tous, et un refus sans concession de toute forme de violence et d’abus  sur le plus faible, d’où qu’elle émane. Cela implique que les professionnels eux-mêmes soient reconnus, soutenus et accompagnés dans le sens qu’ils donnent à leurs actes.

 

• La bientraitance est une recherche :

Elle exige de la part des professionnels une réflexion collective sur les pratiques, une prise de recul régulière, et une mise en acte rigoureuse des mesures qui ont été choisies pour améliorer les pratiques. Les équipes doivent être à la recherche de la meilleure réponse possible à un besoin identifié à un moment donné.

Cette recherche doit prendre en compte le plus grand nombre de paramètres possibles concernant l’usager : son identité et ses besoins, son parcours avant sa rencontre avec la structure et les possibilités qui s’offrent à lui ensuite, ses proches, et tout ce qui fait son expérience personnelle dans le monde – ses objets personnels, ses vêtements, son univers de sons ou d’images, son animal familier…

Danielle Rapoport, psychologue, vice-présidente et co-fondatrice de l’Association Bien-traitance, (formation et recherches), elle est à l’origine du concept de bien-traitance. Voici un extrait de son article « Enfants bien-traités, adultes bien-traitants » disponible sur le site :  www.accompagnerlavie.net

« Les difficultés pour nombre de professionnels de la petite enfance méritent ici d’être soulignées. Bien-traiter un enfant suppose en effet de maintenir dans la simultanéité le souci de la globalité de son évolution et de son histoire en construction, alors que nous sollicitent conjointement des aspects si divers de son développement, dont aucun n’est prioritaire et dont tous sont fondamentaux ! Bien-traiter un enfant implique la prise en compte constante de toutes ces composantes : affectives, verbales, psychomotrices, intellectuelles, sensorielles, sensuelles et sexuelles, relationnelles et sociales…, tout en respectant la spécificité propre à chaque âge et à chaque stade, ce qui remet en cause cette sur-stimulation et cette adultisation qui guettent tant les enfants de nos jours. Et tout en respectant la place de chacun, de ses parents, des professionnels et de l’enfant. » (A lire : Danièle Rapoport,« La bien-traitance envers l’enfant. Des racines et des ailes » Belin, Paris, 2006)

 

Les notions associées au concept de bientraitance

 

• La notion de bienfaisance, plus ancienne, est l’un des trois principes éthiques fondamentaux de la recherche médicale concernant la protection des sujets humains (au même titre que le respect de la personne et la justice). La bienfaisance, définie comme une « obligation », comporte deux règles générales : « (1) ne faites pas de tort ; et (2) maximisez les avantages et minimisez les dommages possibles ». Retenons l’idée d’une absence de tort faite à l’autre, d’une part, et surtout d’un équilibre à trouver au sein des pratiques entre ce qui apportera un bénéfice et ce qui causera du tort à l’usager.

• La notion de bienveillance, plus récente, se situe au niveau de l’intention des professionnels. Elle consiste à aborder l’autre, le plus fragile, avec une attitude positive et avec le souci de faire le bien pour lui. La notion contient le mot « veille », donc c’est chacun qui doit veiller, être vigilant ! Retenons  l’importance de l’intention envers l’autre.

• La notion de mère « suffisamment bonne », issue de la psychanalyse, développée par le pédopsychiatre Donald Winnicott, peut également être citée : il s’agit d’une capacité d’adaptation de la mère pour prendre soin de l’enfant, pour s’ajuster à cet enfant particulier, pour percevoir et répondre à ses besoins de façon appropriée à un moment donné. Ce n’est pas une compétence abstraite et générale : il n’y a pas de mère parfaite ! La posture professionnelle de bientraitance n’est pas une posture maternante. mais elle contient elle-aussi l’idée de savoir s’adapter : il s’agit d’une posture d’ajustement à un usager singulier à un moment donné.

• La notion de sollicitude, développée principalement par le philosophe Paul Ricœur, consiste à adopter envers l’autre, au sein d’une relation dissymétrique, une attitude permettant de rétablir un équilibre plutôt que d’accentuer le déséquilibre. La sollicitude est un geste individuel qui vise à instaurer une relation équilibrée et respectueuse de l’autre, bien qu’on ne puisse pas forcément parvenir à réparer la différence ou soulager la détresse.

• La notion de care, issue des écrits anglo-saxons, vise à différencier « prendre soin » de « guérir » qui est plus technique. Elle se réfère à un accompagnement de proximité où une place importante est donnée à l’expérience des professionnels : Les attitudes et comportements du « care » ne sont pas déterminés par la règle ou le droit, mais par l’adaptation des réponses à une situation donnée, à une personne singulière: « la pratique du care implique de sortir de son propre cadre de référence pour entrer dans celui de l’autre »

• La notion de reconnaissance est également éclairante, car elle met l’accent sur l’importance pour toute personne d’être regardée favorablement par ceux qui l’entourent pour développer une image positive d’elle-même et en conséquence, pour déployer ses capacités au mieux.

• Enfin le concept de bientraitance voit le jour dans les années 90 au sein du comité de pilotage ministériel de « L’opération pouponnières » (1997) qui visait à l’humanisation de l’accueil de très jeunes enfants. Les professionnels souhaitaient « rechercher activement des moyens permettant de ne pas se laisser envahir par le découragement provoqué par la complexité des situations de maltraitance. » Le terme désigne une démarche « impliquant avant tout, malgré les séparations et les ruptures, de respecter la continuité du développement de l’enfant dans son histoire, non plus à court terme, mais envisagée dans un projet d’avenir, et de l’aider à construire son identité dans la sécurité affective et l’épanouissement de toutes ses possibilités. » (D. Rapoport, « la bien-traitance envers l’enfant »)

 

Eléments fondamentaux de la bientraitance relationnelle :

 

• L’accueil :

Il importe de personnaliser l’accueil et d’accompagner l’intégration dans la structure : donc d’accorder une attention particulière à cette étape par la mise en place d’un dispositif garant de la capacité d’écoute et de compréhension de l’enfant et de ses proches. Cela suppose une personnalisation de l’accueil, l’aménagement d’un espace préservé pour la rencontre, et l’accompagnement dans la durée jusqu’à ce que l’intégration soit effectivement réalisée.

• L’écoute :

Le respect de la personne et le développement de son autonomie ont pour fondement l’écoute, et la prise en compte de sa parole. La bientraitance valorise l’expression des personnes accueillies. Il importe que les professionnels soient à l’écoute des besoins et des demandes de l’enfant et mettent en place des modalités de fonctionnement, des occasions de disponibilité et d’écoute active lui permettant de s’exprimer librement.

Sa parole doit être prise en compte, ou celle exprimée par son représentant légal ou par ses proches lorsque la personne elle-même ne peut les énoncer. Il est recommandé que les professionnels adoptent une démarche d’attention et de compréhension adaptée dans le cas des jeunes enfants, ou des usagers présentant des troubles du comportement ou du langage.

Il est utile aussi que des possibilités d’expression diversifiées soient offertes : temps privilégié d’un échange singulier au moment d’un jeu par exemple, ou échange non verbal à travers la participation à une activité, ou encore communication gestuelle si  le langage fait défaut.

• La qualité des relations au quotidien :

Elle repose sur deux notions :

- La notion de reconnaissance : Il est utile de rappeler l’importance pour toute personne d’être regardée favorablement par ceux qui l’entourent pour développer une image positive d’elle-même et en conséquence, pour déployer ses capacités au mieux.

- La notion de communication respectueuse non violente, (issue des enseignements de Carl Rogers) est utile pour approcher la démarche de bientraitance relationnelle. C’est la faculté d’empathie qui est mise en avant dans ce type de communication : savoir écouter sans juger, comprendre l’autre malgré les différences de points de vue, montrer sa sensibilité à ce qu’il vit. Il importe de savoir observer et différencier les faits, les actes, de la personne, pour respecter son identité, sa personnalité, en évitant de mettre l’autre en accusation par les jugements de valeur.

Il importe également de reconnaître ses propres sentiments, d’avoir conscience et d’exprimer ses besoins propres, avec authenticité et congruence, ce qui facilite également la compréhension des besoins de l’autre. Cela permet de savoir formuler sa demande de façon acceptable pour l’autre et de pouvoir négocier, dialoguer, coopérer pour contribuer à rétablir le bien-être mutuel.

 

• Définition de la bientraitance relationnelle :

Il s’agit d’une attitude (intention) et de comportements (savoir faire) qui communiquent à autrui qu’on le prend en considération et qui vise à établir du respect mutuel dans une relation durable avec lui.

De la part des professionnels (accueillants, encadrants, animateurs, éducateurs, soignants, et autres détenteurs de l’autorité) cela suppose la pratique de comportements facilitateurs de l’expression authentique de chacun :

- Assertivité : savoir formuler respectueusement des messages pour informer, exprimer ses besoins, poser des limites, prévenir, confronter, recadrer..

- Ecoute active : savoir accueillir l’expression (verbale ou non), entendre et comprendre, décoder le besoin s’il est implicite, accepter et apaiser l’émotion, canaliser la réaction qui se manifeste pour faciliter un dialogue constructif.